18/09/2009

Histoire de fées

J'ai demandé à mes élèves d'écrire une histoire où ils devraient passer au tordeur des classiques de contes pour enfants. Un peu comme dans ce livre.

Voici donc l'exemple que j'ai écrit pour leur prouver que c'est faisable, même pour des sixièmes année!

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Il était une fois, sur une piste cyclable dans une petite ville que ses habitants surnommaient affectueusement St-Glin-Glin-des-Meuh-Meuh, une petite fille qui roulait sur son vélo rose, les cheveux aux vents, libérés de son capuchon rouge. Elle avait dans son petit panier, accroché sur son guidon, une petite commission pour sa grand-mère. Sa maman avait soigneusement emballé le tout et lui avait interdit de l’ouvrir : “ C’est pour Mère-Grand, pas pour toi, petite curieuse!” lui avait dit sa maman, sur un ton qui ne souffrait aucune question.

Parce que toute personne qui connaissait notre petit chaperon rouge savait à quel point elle était curieuse. Et tout le monde sait à quel point la curiosité est un bien vilain défaut.

Voilà donc notre petite fille, roulant gaiement sur la piste, les cheveux au vent, le regard sans cesse attiré par ce mystérieux petit paquet dans son panier. Son regard était tant attiré par son panier qu’elle en oublia de garder les yeux sur la piste devant elle. Ce qui devait arriver arriva : elle chuta.

Un monsieur qui passait par là, s’arrêta pour lui offrir son aide. Il avait des longs cheveux gris tout mêlés dans sa toute aussi longue barbe grise. On aurait dit le Père-Noël après un passage dans une cheminée particulièrement sale. Son allure revêche ne lui enlevait pourtant pas une allure de gentil monsieur : ce devait être à cause de son petit nez en trompette et de ses petits yeux moqueurs.

Le vieux monsieur la regarda et lui demanda alors ce que contenait son petit paquet qui trainait maintenant sur la chaussée.
“Tu devrais l’ouvrir, tu sais, petite. Peut-être que ce qu’il y a là est brisé. Peut-être que ce cadeau n’en est plus un.”
“ J’ai promis à maman de ne pas regarder, dit-elle, les yeux tout de même dévorés par la curiosité.”
“Allez, personne d’autre que toi et moi ne le sauront. Je t’aiderai à le refermer pour que rien n’y paraisse. Allez, ouvre le paquet.”

La petite fille n’en pouvant plus et se sentant satisfaite par les arguments du vieux monsieur, ouvrit le paquet.

Une fée en sortit... Une fée horrible, avec de longues ailes noires et piquantes, avec des petits yeux jaunes et des ongles semblables à des griffes. Sa robe était d’un rose criard et en lambeaux. Rien de très encourageant pour un cadeau pour Mère-Grand.

“ Tu as désobéi petite curieuse, dit la fée d’une voix geignarde. Tu seras donc punie.”
Et au même moment, le vieux monsieur se transforma en sa mère qui pleurait.

“ Tu as reçu un sort à ta naissance. La fée que voici t’a jetté un sort à ta naissance. Et si tu ne réussissais pas à ne pas te laisser aller à ta curiosité sur un défi qu’elle te lancerait pour tes 8 ans, qui sont demain, tu lui appartiendrais pour toujours. Pourquoi n’as-tu pas résisté?”

Alors la fée à la robe vraiment laide la tira par l’oreille et l’obligea à la suivre. Notre petite fille se demandait bien comment elle pourrait s’en sortir. La fée sembla lire dans ses pensées et lui dit: “ Tu seras avec moi pour toujours, petite curieuse!”

Pendant des années, la petite fille fut prisonnière de la méchante fée aux goûts douteux en matière de robes. La fée la fit travailler sans relâche pendant des années, l’obligeant même à faire la vaisselle et laver les planchers. Chaque nuit, elle faisait dormir la petite fille dans une pièce si froide que la petite fille, pour se réchauffer, s’endormait dans l’âtre. Au matin, à son réveil, elle était pleine de cendres et les gens du village commencèrent à l’appeler Cendrillon lorsqu’elle y descendait acheter les victuailles nécessaires pour son repas.

Lors d’une nuit particulièrement froide, la petite Cendrillon n’en pouvant plus, se mit à pleurer et à regretter d’avoir été si curieuse. C’est alors que sa chambre se remplit de lumière et qu’une fée, avec de bien meilleurs goûts en matière de robes, apparut. Elle ressemblait beaucoup à sa Mère-Grand.

“Ma petite Cendrillon, je suis venue te dire que ton calvaire achève. Bientôt, tu auras l’occasion de retrouver ta liberté. Pour cela, tu dois réussir un défi impossible pour toi. Y échouer, tu demeureras pour toujours la prisonnière de la méchante fée. Réussir te libèrera. Et je peux te dire que la fée a de drôles de projets pour toi... Que choisis-tu?”

“Mais quel est le défi? demanda notre petite Cendrillon”

“Je n’ai pas le droit de te le dire. Tout ce que je peux te dire, c’est qu’il est extrêmement difficile.”

“J’accepte.”

“ Alors tu devras demeurer silencieuse pendant 6 mois, 6 jours, 6 heures et 6 minutes, durant lesquelles tu devras confectionner autant de petits chandails que la méchante fée a de prisonniers. Avant que le temps ne se soit écoulé, tu devras leur faire porter tous en même temps le chandail que tu leur auras fabriqué. Si tu réussis, tu seras libre, ainsi que les 7 prisonniers de la fée.”

Cendrillon acquiesça sans parler. Elle était prête.

Pendant 6 mois et 6 jours, elle ne parla point. Toute la journée, elle faisait les corvées que la fée lui ordonnait et le soir elle tricottait les chandails jusqu’à ce que ses doigts lui fassent trop mal et que ses yeux se ferment tout seuls. Le tout dans le secret le plus total et surtout, en silence.

La fée aux robes affreuses ne se plaignit jamais de ce silence. Elle était enfin heureuse que la petite fille ne lui pose plus de questions et ne se lamente plus de son triste sort. Mais les autres prisonniers n’en pouvaient plus de son silence et la questionnaient sans arrêt, ce qui ne fut pas facile. Ces derniers adoraient quand elle leur racontait des histoires et ils la pressaient de leur en dire de nouvelles.

Heureusement, la dernière journée était enfin arrivée. La jeune fille fit venir près d’elle tous les prisonniers de la fée et leur offrit les chandails. Les autres enfants étaient tous très heureux de ce cadeau, surtout qu’ils avaient toujours froid la nuit. Tous mirent leur chandail. Cendrillon leur expliqua alors tout et attendit que la bonne fée revienne.

Lorsque la bonne fée se présenta, Cendrillon alla la voir et lui demanda si elle était libre. La bonne fée lui dit que oui. Que le château lui appartenait maintenant. Qu’en ayant battu ainsi la méchante fée, qu’elle avait hérité de ses pouvoirs et était maintenant elle aussi une fée.

Notre petite Cendrillon devint alors la Fée de l’Est et porta de belles chaussures qui faisait voyager partout lorsqu’on en claquait les talons. Ce que c’est bon la vie de fée!

Fin!

21/07/2007

La sorcière qui vivait derrière chez moi

Ce texte se veut seulement être la présentation d'un personnage récurrent de mon histoire. Je l'ai inventé après qu'un enfant d'une classe où je faisais de la suppléance s'écria en me voyant : UNE SORCIÈRE! Naturellement, je ne le démentis pas, au contraire! ;)




Tu te souviens peut-être que je t'ai raconté une histoire de danse de pluie. Tu te souviendras alors que j'avais réalisé cela parce qu'il y avait un sous-bois derrière chez moi. Le sous-bois était un sous-bois et non une forêt complète parce que des rues s'étaient construites tranquillement, enlevant doucement un peu de nature chaque année, jusqu'à ce que le sous-bois soit quadrillé, qu'il n'en reste qu'un petit espace entouré de petites maisons toutes identiques les unes aux autres. Justement, sur l'une de ces rues, qui se trouvait derrière chez moi, seulement séparée par le sous-bois, vivait une sorcière.





Je l'ai découvert un soir où l'on jouait à la cachette dans le noir, mes amis et moi. Je me suis cachée dans un buisson et j'ai soudain vu un éclat de lune se refléter sur quelque chose qui semblait sortir de l'arbre. J'étais très courageuse, assez pour aller voir, mais je ne voulais pas me faire prendre, je te rappelle que nous jouions à la cachette! Je m'avançai alors discrètement vers l'arbre, toujours tapie dans les buissons. Ce pouvait être n'importe quoi. Peut-être que la nuit les arbres devenaient vivants et se préparaient à aller au théâtre et revêtaient leurs plus beaux habits et se couvraient de bijoux brillants. Peut-être qu'un lutin y avait caché son trésor et que l'arbre était tellement plein que les bijoux en sortaient tranquillement comme une cascade. Peut-être que j'assistais à la transformation magique d'un arbre en... chevalier brillant! Ça aurait pu être n'importe quoi!





Soudain, je criai! AAAAAAAAAAAHHHHHHHH!!! Une main s'était posée sur mon épaule et m'avait terriblement fait peur. Mon coeur battait la chamade et je n'osais pas me retourner. Ça aurait pu être le lutin mécontent que j'ai découvert son trésor. Seule une voix, provenant du corps à qui appartenait la main, me ramena à la réalité : TOUCHÉ! Ce n'était que mon voisin qui m'avait découverte. Mais, la chance étant avec moi, j'étais la dernière trouvée et tout le monde était là. Tout le monde, ça signifiait mon voisin, ma voisine et sa jeune soeur, mon frère et moi.





Leur regard se porta vers l'endroit où je me dirigeais et leur réaction fit écho dans la forêt : OHHHHHHHHHHHHHH!



Une épée était plantée dans un morceau de tapis broché dans l'arbre. Une vision d'horreur quoi! Tout mes amis se sauvèrent tant la peur les tenaillait. De mon côté, je m'approchai et y braquai ma lampe de poche (je vous rappelle qu'il fait noir!). Soudain, une voix derrière moi dit:

-Tu ne te sauves pas comme tes amis?

-Pourquoi le ferais-je? Je devrais avoir peur d'un morceau de tapis planté dans un arbre?? Pfffit, c'est mal me connaître!

Mais dans le fond, j'avais tellement peur... et cette dame était somme toute bizarre!


-Je suis une sorcière tu sais, me dit-elle, comme pour confirmer mes doutes. Les gens des environs me craignent parce que je suis une sorcière. Pourtant, je n'ai jamais rien fait de mal! En fait, MOI, contrairement à toi, je n'ai jamais causé de déluges. Je me trompe ou c'était toi??

Sous son regard inquisiteur, je n'eus d'autres options que d'acquiescer et d'avouer mes torts! Je lui racontait l'histoire de la danse de la pluie. Tout au long, elle souria. Mais ses dents n'étaient pas toutes jaunes ou noires, tordues ou absentes. Elle avait de jolies dents. Des cheveux gris remontés proprement en chignon. Un jean bleu foncé avec une chemise bourgogne. Rien de bien exceptionnel. Rien qui ne me fasse la croire que c'était une sorcière.

Elle me proposa de venir prendre un jus avec des biscuits chez elle, demain, si je n'avais toujours pas peur. Je relevai le menton en signe de défi et lui dit que ma mère ne voulait pas que j'accepte la nourriture d'inconnus qui pourraient m'empoisonner.

-Soit, dit-elle. Apporte ta collation et nous discuterons.

Le lendemain, je me pointai chez elle avec 2 biscuits et un peu de jus. Nous avons parlé de beaucoup de choses que je me dois de garder secrètes... mais elle me dit des trucs que jamais je n'avais entendu. Elle m'expliqua même comment faire des sorts assez particuliers, ce qui fait que maintenant, simplement à regarder les gens, je peux savoir s'ils me disent la vérité ou s'ils mentent. C'est très pratique.

À la fin de la journée, je quittai en promettant de revenir. Ce que je fis régulièrement. Même, qu'elle m'aida à résoudre bien des problèmes auxquels je fus confrontée. C'est grâce à elle que j'ai su comment rendre à Dame Nature sa baguette. C'est grâce à elle que je sus comment faire peur à mon voisin (j'adorais lui jouer des tours). C'est grâce à elle que je suis maintenant un peu sorcière...

19/07/2007

Comment j'appris la danse de la pluie

Tu sais, lorsque j'étais gamine, j'avais un don inné pour me mettre dans le trouble comme on dit. C'est pas que je cherchais les problèmes, mais c'est comme si les problèmes eux-mêmes me trouvaient. Mais je ne m'en plains pas, ça me fait plein de belles histoires à raconter aux enfants. Je t'ai déjà raconté comment j'avais appris la danse de la pluie? C'est une belle histoire tu sais!

Jeune, j'avais un frère. Oh! La guerre, je ne te dis pas. Toujours en train de nous chicaner, mais ça ne voulait pas qu'on dire qu'on ne s'aimait pas, on était juste trop orgueilleux pour laisser l'autre avoir raison de temps à autre! Ça nous empêchait pas de jouer ensemble par contre. Et derrière chez moi, il y avait un sous-bois. Le même sous-bois où j'ai chevauché Victor, le chat noir de Dame Nature pour lui rapporter sa baguette, mais ça, c'est une autre histoire que je te raconterai si tu es sage la prochaine fois. Nous y jouions souvent dans ce sous-bois. Ce n'était pas très grand, mais bien assez pour y faire des follies et laisser aller notre imagination!

On prenait toujours les mêmes sentiers : on n'avait pas vraiment le choix, il n'y en avait pas des milliers! Une fois, on a remarqué un sentier qui passait sous les sapins. Jamais je n'étais passé par là. Jamais. Je regardais mon frère qui ne semblait pas plus que moi savoir où ça menait. On était pas mal dégourdis pour notre âge: il a suffit d'un regard pour que nous prenions le sentier sous les sapins.

Nous avons dû marcher tête baissée pendant quelques temps, parce que le sentier était vraiment SOUS les sapins... tellement sous les sapins, qu'il faisait très noir. Tellement noir que nous ne nous étions même pas rendus compte que le sentier passait SOUS terre, pas juste sous les sapins. Nous nous sommes donc enfoncés sous terre. Bientôt, heureusement car mon frère avait peur du noir, mais pas moi, je n'ai jamais eu peur du noir, jamais, jamais... tu me crois, n'est-ce pas? Donc, bientôt, nous vîmes un peu de lumière et nous nous sommes dirigés vers elle et nous avons enfin pu revenir au soleil. Mais le spectacle qui s'offrait à nous était désolant.

Plein de gens allaient en se tenant la tête et en pleurant. Mon frère et moi, on ne savait pas trop quoi faire. Mon frère fonça et osa demander à quelqu'un ce qui se passait. La personne nous expliqua qu'il n'avait pas plu depuis des mois... la terre était déséchée et ne produisait plus de légumes, de céréales, de fruits; la végétation était en train de mourir. On leur demanda pourquoi ils n'arrosaient tout simplement pas. Leur réponse m'étonna...

"Nous sommes un peuple qui nous fions toujours à la Nature pour répondre à nos besoins. Habituellement, nous lui faisons une danse afin qu'elle accepte de nous envoyer l'eau nécessaire. Mais, notre danseuse est malade depuis des mois et est incapable de faire la danse de la pluie. Personne d'autre qu'elle ne peut la faire. Nous la connaissons toute cette danse, mais personne ne dégage assez de magie pour faire tomber la pluie."

"Je peux essayer, peut-être que j'ai de la magie, dis-je. Ma mère me dit souvent que je suis sa petite sorcière. Apprenez-moi la danse!" Ce qu'ils firent. Lorsque je sus la danse, je l'exécutai telle qu'apprise. Et miracle! La pluie commença à tomber. Ils me remercièrent et mon frère et moi retournâmes par le sentier sous les sapins, juste à temps pour souper.

Il mouillait aussi de notre côté du sapin. En fait, il n'arrêta pas de mouiller pendant des jours, des semaines... Des inondations se préparèrent et finalement, les eaux s'emportèrent, sortant de leurs nids et rayant de la carte des maisons, des rues, des pancartes. Tout était sous les flots. Désespérée, je me sentais mal : c'était ma faute, j'avais fait la danse de la pluie. Je devais faire quelque chose.

Je fis alors la seule chose brillante auquelle je pensai : j'allai dans les bois pour retrouver le sentier sous les sapins. Ce ne fut pas facile, je dus nager dans le sentier tellement il y avait de l'eau. Je n'étais pas une très bonne nageuse en plus, j'ai eu peur de me noyer! Heureusement, le sentier n'était pas long et je parvins à resortir de l'autre côté. Les gens se promenaient en radeau, en canot, en bateau, comme ils pouvaient, mais pas sur leurs pieds. Je me sentais vraiment gênée d'être de retour. Soudain, on m'aperçut.

"Te voilà! Enfin! dit une gamine. Je suis la danseuse. C'est moi qui fait venir la pluie, mais aussi le soleil. Après ton départ, j'ai fait ma danse du soleil, mais sans succès. Il semblererait que la personne qui fasse la danse de la pluie doive aussi faire celle du soleil."
"Apprends-la moi, lui dis-je. C'est l'apocalypse de l'autre côté aussi. Il faut agir."

Je te raconte comment faire, exactement comme la danseuse me l'a appris. C'est très simple. Toi aussi, tu peux l'essayer, ce n'est pas une danse aussi dangereuse que celle de la pluie, quoiqu'en certains pays, parfois, des enfants la font trop et ils ont des sécheresses, mais ici, au Québec, ça ne fera pas de tort. Tu dois voir un soleil immense en toi. L'imaginer prendre toute la place. Ressentir sa chaleur. Ensuite, tu dois sourire comme si tes dents laissaient passer les rayons du soleil. Si tu le fais correctement, le soleil devrait se pointer.

Naturellement, j'ai réussit à le faire et le soleil est apparu. Tranquillement, les choses sont revenues à la normale. Mais depuis, je ne fais plus la danse de la pluie. Et ne compte pas sur moi pour te l'apprendre, la danse du soleil est bien suffisante, ça fait des gros dégâts la danse de la pluie. Tu as entendu parler du déluge du Saguenay? Hé, bien, je n'ai jamais trop compris pourquoi ce nom, parce que je sais qu'en fait, il devrait porter mon nom ce déluge! Mais bon, je ne suis pas allée m'en vanter d'avoir presque détruit la moitié du Québec...

18/07/2007

La véritable histoire de Jeannot Lapin

Cette histoire a déjà été écrite sur mon autre blog, mais je vous la transcris ici telle que racontée aux enfants, sans interruption. Elle a été racontée en maternelle à des enfants de 5 ou 6 ans.




Je devais avoir ton âge, peut-être un peu plus vieille, mais à peine, lorsque j'ai rencontré une personne vraiment spéciale! Laisse-moi te raconter l'histoire tel que cela s'est produit. Mais avant, ce que tu dois savoir, c'est que chez moi, mes parents possédaient une boîte de compost. Le compost, c'est les restes de nourriture, les pelures des fruits ou des légumes, tout plein de choses qui se décomposent et qu'on peut utiliser pour faire pousser les légumes du jardin ou la pelouse. La boîte était vraiment grande, en bois, et je n'avais naturellement pas le droit de jouer près.

Un jour, je jouais gentiment dehors, on était au printemps, quand j'entendis un bruit provenir de la boîte de compost. Je n'avais pas peur du bruit. Ça ne faisait pas le bruit que fait un monstre sous le lit ou un dragon dans le garde-robe, car ça, c'est un tout autre bruit, une toute autre histoire que je te raconterai une autre fois. Je me suis dit, au bruit que cela faisait, que ce devait être un écureuil ou un oiseau qui était prisonnier de la boîte. Tu as déjà senti une boîte de compost? Ça pue, c'est é-pou-van-ta-ble! Je ne pouvais pas laisser cette pauvre petite bête dans ça! Et comme je n'écoutais pas toujours ma maman...

J'ouvris la boîte en m'en tenant loin. L'écureuil ou l'oiseau voudrait sûrement sortir rapidement et je ne voulais pas être blessée. Je fis donc le tout les yeux à moitié fermés, levant le couvercle du bout des bras, mon corps entier penché vers l'arrière! Rien. Rien ne se fit voir. Rien ne se fit entendre. Je m'approchai doucement, question de savoir... Peut-être la petite bête était-elle blessée, évanouie en raison des odeurs, partie autrement, qui sait! Je devais savoir. Je m'approchai encore plus. Je me placai le visage bien au-dessus de la boîte, le nez bouché naturellement, qu'est-ce que vous croyez! Vous ne devinerez jamais ce qu'il y avait dans la boîte.

Un lapin! Un joli lapin qui fut blanc autrefois, mais que le compost avait sali et faisait paraître brun. Je tendis les bras pour le sortir de là doucement quand j'entendis une voix dire doucement :"Merci!" Par habitude, je répondis : "Pas de quoi!" Et soudain, je me rendis compte de l'incroyable moment qui allait se dérouler sous mes yeux. Car quoi d'autre qu'un prince charmant transformé en lapin pouvait me parler! Je me voyais déjà avec les robes, les diadèmes et tout le tralala... Misère, j'étais complètement à côté!

"Je suis Jeannot, le lapin de Pâques. Si tu n'avais pas passé par ici, Pâques aurait été à l'eau cette année! Je voulais cacher un oeuf ici et le couvercle s'est subitement fermé sur moi, m'emprisonnant dans cet endroit de puanteur extrême!"
"..."
"Tu ne parles pas? Aurais-tu perdu ta langue?"
"Ben c'est que je pensais..."
"Que les lapins ne parlaient pas?"
"Non! Que j'avais trouvé un prince..."
"..."
"Et en plus, Jeannot, il est pas supposé être grand?"
"Pfffit!!! Tu penses que ça passe inaperçu un lapin de 6 pieds cachant des oeufs toi?? Faut se fondre dans la foule chère!"

Mon désarroi de m'être ainsi trompé étant passé, il me raconta son travail et à quel point cela l'épuisait! Je n'avais rien de mieux à faire que de l'aider, alors je lui proposai mon aide (et en plus, avouez que ça semblait excitant, même si ce n'était pas un prince!). Tranquillement, toute la journée, nous avons caché des oeufs. En fait, il pondait un oeuf et le prenait dans ses mains encore tout chaud. Moi je n'avais pas le droit, mes doigts étaient trop chauds et faisaient fondre le chocolat trop vite! Et comme personne ne veut manger d'oeufs au chocolat pleins de traces de doigts... Mon travail était de le libérer lorsqu'il était en mauvaise posture. Et ça arrivait souvent, croyez-moi, c'est à se demander comment il réussissait avant que j'apparaisse!

À la fin de la journée, tous les oeufs étaient bien cachés. Il me regarda avec un regard très sérieux et me dit : "Tu n'as pas le droit d'aller les chercher, de faire la chasse, parce que tu sais où ils sont cachés. Par contre, je vais te cacher une poule en chocolat juste pour toi, une énooooooooooorme poule en chocolat. C'est cela que tu devras trouver demain. "

C'est depuis ce jour qu'à Pâques, il y a non seulement des oeufs en chocolat, mais des poules, des poussins et plein d'autres choses, pour les enfants qui ont aidés Jeannot. Comme tu vois, il lui arrive souvent d'être dans le pétrin. Je le sais, parce qu'à chaque année, je vérifie la boîte de compost et il y est toujours, année après année, et on en profite pour parler du bon vieux temps!